Le bonus-malus sur les cotisations UNEDIC est conçu par le gouvernement comme un élément de sanction des « mauvais élèves » de la classe entrepreneuriale et comme une contrepartie aux ordonnances travail. Cette profonde méconnaissance du segment des TPE par les pouvoirs publics engage 2,1 millions d’entreprises sur une voie dangereuse de déstabilisation (Intervention de Marc Sanchez, Secrétaire Général du SDI dans Les Echos).
Une logique punitive déconnectée de la réalité des TPE
Soyons clairs, l’objet du bonus-malus n’est pas de compenser le surcoût des contrats précaires pour l’UNEDIC. Dans cette hypothèse, le seul malus aurait suffi et le calcul ne porterait pas sur l’ensemble des fins de contrat, CDI compris. Pour appréhender correctement la philosophie du gouvernement, il est nécessaire de se placer dans une logique de sanction des modalités de gestion du personnel par le chef d’entreprise. Ainsi, selon Aurélien Taché, Rapporteur du texte à l’Assemblée nationale, le malus punira les « mauvais élèves » et le bonus récompensera les autres. Le gouvernement s’érige ainsi en Conseil de discipline patronale, en juge d’une éthique sociale appliquée indifféremment à l’ensemble des entreprises mais totalement déconnectée de la réalité vécue par les TPE.
L’argument inopérant de la « contrepartie »
Le gouvernement estime avoir donné des gages de flexibilité par les ordonnances « travail » et demandent en contrepartie aux entreprises d’embaucher, sinon exclusivement, du moins prioritairement en CDI. De fait, il est désormais possible, sur la base d’un accord avec les syndicats, d’adapter le temps de travail en fonction des besoins et des opportunités du marché. Cependant, une fois encore, ces modalités sont concrètement inapplicables au sein des 2,1 millions de TPE dont 85% ont moins de 5 salariés ! La préoccupation de ces derniers ne réside pas dans la flexibilité du personnel en place, mais déjà dans le recrutement et le maintien de personnel compétent, le remplacement du cuisinier malade sans lequel le restaurant ferme ses portes, l’embauche temporaire pour faire face à un surcroît d’activité sans visibilité à trois mois du carnet de commande.
Un système foncièrement inéquitable pour les petites entreprises
Il est foncièrement inéquitable d’aborder sous le même angle l’entreprise moyenne ou grande dont certains postes pérennes sont occupés par des intérimaires successifs, et la TPE qui ne dispose ni de la taille critique ni des services financiers et RH en capacité d’organiser un business plan de long terme.
Il est ainsi foncièrement inique d’inclure dans le taux de séparation, base de calcul du bonus-malus, l’ensemble des contrats, toutes origines et tous motifs confondus. Par exemple, en quoi le licenciement d’un salarié déclaré inapte par la médecine du travail, la fin d’un contrat saisonnier ou la fin d’un CDD de remplacement d’un salarié malade, peuvent-il être considérés comme des actes immoraux, et donc financièrement sanctionnables, du chef d’entreprise ?
Il est urgent que le gouvernement identifie clairement le segment des TPE, au-delà du simple sigle régulièrement présent dans les Projets de loi, et cesse de les confondre avec les PME et les grandes entreprises.
A défaut de se livrer à cet exercice salutaire pour 2,1 millions de structures entrepreneuriales qui représentent 20% de l’emploi salarié, ce projet s’annonce comme aussi ingérable que le défunt compte personnel de prévention de la pénibilité (C3P) ! Une mesure d’exemption s’impose pour ce segment d’entreprises.