Dialogue social : ce qui attend les TPE au 1er juillet 2017

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Après l’échec des négociations entre partenaires sociaux en vue d’assurer la représentativité des salariés des TPE, le gouvernement s’est saisi du sujet au travers de la loi Rebsamen portant sur le dialogue social.

La question soulevée est de savoir comment assurer la représentation des employés des entreprises de moins de 11 salariés, seule catégorie d’entreprises dont la loi ne prévoit pas à ce jour d’élections de représentants du personnel.

Un schéma calqué sur celui de l’artisanat avec les CPRIA au bilan pourtant bien maigre

22 CPRIA en France

Comme attendu, les pouvoirs publics ont retenu le « modèle » des CPRIA (Commissions Paritaires Régionales Interprofessionnelles de l’Artisanat) en vigueur depuis 2008 dans de nombreuses branches de l’artisanat moyennant le prélèvement de 0,15% de la masse salariale des entreprises concernées.

Les CPRIA sont désormais au nombre de 22, conformément à l’ancienne carte administrative des régions. Après sept années d’exercice, les points forts de leur bilan sont pour le moins bien maigres.

Un bilan bien maigre

  • Création du Comité des Œuvres Sociales de l’Artisanat : il s’agit d’une sorte de comité d’entreprise en vue d’un accès à des conditions avantageuses à des offres de culture et de loisirs
  • Création de l’Observatoire Emploi et Métiers de l’Artisanat en Alsace : sur ce secteur géographique, cet observatoire vient s’ajouter à celui de la Région, à celui de l’OPCA AGEFOS, à celui du Fonds d’Assurance Formation du Travail Temporaire, à celui de la CCI, à celui de la Chambre de métiers, sans compter bien sûr celui de Pôle Emploi. Avec une telle somme d’observateurs, il est étonnant que la courbe du chômage puisse encore augmenter sans que personne ne s’en aperçoive, ou de moins n’agisse en conséquence
  • Création du Livret d’accueil du salarié en Pays de Loire : document destiné aux employeurs et recensant leurs droits et devoirs
  • Création de groupes de travail en faveur de l’amélioration des conditions de travail (Bretagne, Languedoc-Roussillon, Poitou-Charentes)

Des commissions TPE aux compétences morcelées

Combien de TPE réellement concernées par les commissions Rebsamen ?

Sur le principe, l’objectif poursuivi par le projet de loi Rebsamen est d’organiser le dialogue social pour l’ensemble des TPE, soit 2,4 millions d’entreprises et 4,6 millions de salariés. Pour éviter toute redondance, cette logique aurait donc dû conduire à la suppression des CPRIA, ainsi qu’à celle de la centaine de commissions paritaires du dialogue social créées au fil des années dans le cadre des accords collectifs de branche.

Un objectif : ne pas tarir une source de revenus des partenaires sociaux

Face à cette difficulté qui aurait désespéré les partenaires sociaux en les privant de dizaines de millions de ressources financières, le gouvernement a préféré préciser que les compétences des nouvelles commissions paritaires régionales TPE ne devraient pas empiéter sur celles déjà exercées par des commissions (actuelles et futures) créées à même fins, sous réserve notamment que ces dernières soient constituées au niveau régional.

Par ce biais, le gouvernement atteint son objectif principal qui était de préserver la pérennité des CPRIA, objectif partagé avec l’UPA qui retire le tiers de ses ressources financières de ces commissions.

La multiplication des commissions sectorielles

Mais cette formulation porte aussi en germe un alourdissement des charges des entreprises actuellement couvertes par des accords de branche et qui ne prévoient d’échanges sur le dialogue social qu’au niveau national. La facture risque d’être lourde en cas de démultiplication de ces commissions sur les 13 nouvelles régions, sans omettre les 4 régions d’outre-mer.

Enfin, la porte est ouverte à l’organisation de commissions régionales « sectorielles » dans toutes les branches non encore couvertes.

À n’en pas douter, les commissions paritaires TPE se mettront en place. Mais si elles doivent exclure de leur champ de compétence l’ensemble des professions couvertes aujourd’hui ou demain par un accord sur le dialogue social, elles n’auront rapidement plus personne autour de la table.

Composition des Commissions TPE

20 représentants des TPE ?

Le projet de loi prévoit que les commissions seront composées de 10 représentants des employeurs et de 10 représentants des salariés, tous issus des TPE.

Ou bien 20 représentants des syndicats ?

En réalité, il s’agira de 10 membres d’une ou plusieurs organisations patronales représentatives et de 10 professionnels du syndicalisme, sachant que chaque syndicat de salarié dispose de sa branche « TPE ».

Droit d’ingérence des organisations syndicales dans l’entreprise

Le gouvernement face à la majorité parlementaire

Le projet de loi Rebsamen prévoyait explicitement que les organisations syndicales n’auraient pas accès aux locaux des TPE.

Les députés ont cependant déposé et voté un amendement en date du 2 juin 2015 prévoyant au contraire cette faculté « sauf refus du chef d’entreprise ».

Une volonté d'entrisme de la part des syndicats

L’Assemblée nationale a ainsi fait sauter une digue de protection des TPE face à l’arbitraire. Sans préjuger des actions qui pourraient être menées par les membres des commissions paritaires TPE, il est nécessaire de souligner que ces derniers ne sont soumis à aucun des devoirs d’un fonctionnaire par exemple (secret professionnel, charte de déontologie, recours hiérarchique).

En tout état de cause, les commissions paritaires locales sont clairement conçues par certaines organisations syndicales comme un moyen de pratiquer l’entrisme dans les TPE.

Le SDI travaille naturellement activement à renverser l’intervention du chef d’entreprise, lequel ne devrait pas avoir à s’« opposer » mais devrait au contraire disposer de la faculté de « proposer » l’intervention des commissions paritaires en cas de conflit avec un salarié par exemple.

Financement des commissions paritaires TPE

Le financement indirect

Au total, ce sont 180 salariés de TPE qui devraient siéger dans ces commissions, donc 180 salariés qui pourront s’absenter 5 heures par mois, outre le temps passé en réunion à raison d’une journée par trimestre. Au total, ce temps est évalué à environ 90 heures par an. Le salarié ne subira aucune perte de salaire, mais l’employeur sera intégralement remboursé au titre de ce maintien de salaire.

Le financement direct

À ce stade, il n’est pas prévu de prélèvements supplémentaires pour le financement des commissions paritaires TPE.

Le gouvernement évalue le coût de fonctionnement de l’ensemble des 13 commissions à 350.000€/an. Ce dernier chiffre est intéressant au constat que ce sont 16 millions d’euros par an qui sont versés par les artisans pour leurs propres commissions, ni plus nombreuses, ni composées de plus de membres, et dont les missions ne sont pas plus étoffées.

À notre avis, l’impact financier viendra des partenaires sociaux au travers des conventions collectives avec la déclinaison régionale des commissions nationales existantes, ainsi que l’organisation de telles commissions dans les branches non encore couvertes.

Le coût social

Chacun des 180 salariés membres des commissions régionales TPE se verra accorder une protection sensiblement équivalente à celle d’un délégué du personnel dans une entreprise de plus de 10 salariés, autrement dit une impossibilité de licenciement sauf accord préalable de l’inspection du travail, traditionnellement fort sourcilleuse en ce domaine.

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