La quatrième édition du Baromètre du Financement des Indépendants et des TPE, réalisé par Opinion Way pour le Syndicat des Indépendants (SDI), fait état des difficultés persistantes d’accès bancaires des 2,2 millions d’entrepreneurs de moins de 10 salariés, soit 98 % de nos entreprises françaises, aux petits crédits de trésorerie.
Alors que le gouvernement présentera, au printemps 2018, son projet de loi sur la transformation de l’économie, dont le financement des entreprises est l’un des piliers, les indépendants et les TPE aspirent à un plafonnement des frais bancaires et à la portabilité des comptes courants. Objectif : ne plus subir les importants frais financiers imposés par les banques pour le financement de leur trésorerie.
Une trésorerie toujours en berne en 2016, malgré un léger mieux…
La situation économique des TPE a légèrement évolué au cours de l’année 2016. Alors qu’elles étaient 44 % à constater une dégradation de trésorerie en 2015, elles ne sont plus que 38 % sur l’année 2016. Pour autant, le nombre de TPE à observer une amélioration de leur trésorerie reste sensiblement équivalant d’une année sur l’autre (18 % en 2015, 19 % en 2016) ; lorsque pour la majorité d’entre elles (40 %) celle-ci reste stable.
De fortes disparités sont cependant à relever selon la taille de l’entreprise avec une trésorerie qui tend à se dégrader plus fortement dans celles qui emploient 1 à 5 salariés (42 %). Un fait d’autant plus dommageable pour la croissance et l’emploi en France que ces entreprises, qui représentent 86 % des TPE d’au moins 1 salarié, sont les plus à même d’embaucher et de connaître un développement soutenu et durable.
… mais des réponses bancaires aux coûts toujours aussi excessifs
Si la réponse bancaire sous forme de crédit classique au taux actuel moyen de 2 %, pour résorber le déficit de trésorerie des entreprises, est en amélioration (33 % en 2016 contre 24 % en 2015), 45 % des TPE se voient seulement accorder une augmentation d’un découvert autorisé (21 %) ou un découvert autorisé (18 %). Une augmentation de plafond qui dispose, par ailleurs, d’un taux moyen compris entre 10,36 % et 13,38 % au T3 2017, soit un coût 5 à 7 fois supérieur qu’un crédit classique !
Le seul découvert non autorisé, générateur d’importants frais financiers additionnels sous forme de commissions d’intervention, double pour sa part d’une année sur l’autre (+ 3 points par rapport à 2016).
De plus, la proportion d’entreprises qui n’obtient aucune solution reste élevée (13%, +1 point par rapport à 2016). Une nouvelle fois, ce sont les entreprises de 1 à 5 salariés qui s’en trouvent les plus pénalisées avec 25 % de répondants n’ayant obtenu aucune solution.
CICE : 73 % des TPE privilégient sa transformation en baisse de charges
Face au manque de solutions proposées et aux problématiques de trésoreries non résolues, les TPE ont, sur les trois dernières années, opté majoritairement (60%) pour une affectation de l’intégralité du CICE à leur trésorerie. Dans les rares hypothèses où les TPE ont sollicité un préfinancement du CICE auprès de Bpifrance (4 %), l’objectif recherché était lui aussi de financer leur trésorerie (88%), pour des montants obtenus inférieurs à 3.000€ (63%).
Si ce montant peut paraître faible au regard des centaines de millions d’euros dont les plus grandes entreprises ont pu bénéficier, il reflète toutefois une réalité : dans l’attente de mesures concrètes et pérennes, les TPE affectent le montant de ce crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi au colmatage de leur trésorerie. Un CICE trop complexe et de faible ampleur pour aider ces chefs d’entreprise à embaucher, ce qui explique qu’ils approuvent les annonces du gouvernement relatives à la fin du CICE sous sa forme actuelle : ils sont ainsi 73 % à privilégier sa transformation en une baisse directe de charges patronales.
Marc Sanchez, Secrétaire général du Syndicat des Indépendants (SDI) et fondateur du mouvement les98pourcent.fr, commente : « Le Comité de suivi du CICE peine à définir une ventilation correcte des fonds du CICE pour les grandes entreprises, hésitant entre les investissements, les dividendes, les augmentations de salaire et les emplois, sans pouvoir en isoler les effets d’autres influences macroéconomiques. La situation est beaucoup plus claire en ce qui concerne les TPE qui ont utilisé ces fonds pour leur trésorerie en vue de diminuer leurs frais financiers, notamment bancaires, comme nous l’avions annoncé. La transformation de ce système jugé complexe en baisse de charges directement applicable sur les salaires pourrait donc s’avérer un pari gagnant pour l’emploi, sous réserve que le bénéfice en soit bien concentré sur les salaires jusqu’à 2,5 SMIC, soit 90 % des rémunérations versées dans les TPE. Il n’en reste pas moins que le caractère mensuel d’une baisse de charges comprend un effet dilutif au regard du CICE versé annuellement en une seule fois et affecté à un déficit de trésorerie. C’est à ce danger dans le pilotage de la gestion qu’il faut répondre par une action décisive sur l’accès aux petits crédits de trésorerie. »
Plafonnement des frais sur comptes à découvert, portabilité des comptes d’une banque à une autre… les solutions attendues par les TPE !
Afin de diminuer leurs frais financiers et de recouvrer une capacité d’investissement créatrice d’emplois, les TPE émettent une nouvelle fois le souhait de voir instaurer un plafonnement des frais sur compte à découvert (57%), ainsi qu’un droit à la portabilité des comptes d’une banque à l’autre (42%).
Par ailleurs, bien que peu de TPE disent connaître l’existence de Bpifrance (34%), celles-ci s’accordent cependant sur une troisième solution, dans le cas où la banque publique d’investissement serait amenée à financer leur trésorerie, à savoir : le financement direct des besoins en microcrédits de trésorerie des TPE via cette institution (71%), lorsque 26% seulement seraient favorables à ce type de financement par l’intermédiaire d’un établissement bancaire.
Marc Sanchez précise : « Il est temps d’accorder aux 2,2 millions de TPE la possibilité de diminuer drastiquement leurs frais financiers et de consacrer ces sommes à leur croissance. Alors que le gouvernement recherche des leviers pour l’investissement et la croissance de nos TPE afin qu’elles deviennent les PME de demain, nous proposons encore et toujours de faire de la banque un partenaire de la réussite des entreprises grâce à la mise en place d’un plafonnement des frais bancaires sur compte à découvert, et, pour créer un environnement propice à une concurrence bancaire au profit des TPE, d’autoriser la portabilité des comptes entre banques. Des dispositifs encore inaccessibles à ce jour pour les entreprises. Par ailleurs, Bpifrance pourrait enfin jouer un rôle auprès de ces dirigeants en proposant un produit de financement de microcrédits de trésorerie d’un montant inférieur à 15.000€, via une plateforme digitale, comme préconisé dans le rapport d’information des députés Louwagie et Grandguillaume de 2015. »