Les TPE représentent 96% du tissu entrepreneurial français, avec plus de 5 millions d’artisans, commerçants, professionnels libéraux et dirigeants de TPE rejoints depuis 2008 par les microentrepreneurs.
Malgré leur nombre, leur réalité et leur poids sont méconnus.

Pour autant, au-delà des statuts et formes d’exercice de l’activité, ces professionnels rencontrent des difficultés sociales, fiscales et managériales communes, bien différentes de celles des dirigeants de PME avec lesquels ils sont trop souvent confondus, notamment lorsqu’il s’agit de politiques de soutien et autres plans de relance.

Avec l’appui de ses 25.000 adhérents directs sur tout le territoire métropolitain, la mission du SDI est de représenter ces professionnels et défendre leur place essentielle dans le paysage économique et social.

Force de proposition avant tout, apolitique par nature, le SDI entend porter utilement la voix de cette puissance de terrain traditionnellement oubliée des campagnes électorales.

Il s’agit d’une occasion majeure de mettre sur la table les problématiques actuelles et de longue date des millions de TPE de ce pays.

Revoir la notion d'entreprise

INSEE : la grande confusion

Les statistiques de l’INSEE sur la création d’entreprises souffrent d’un biais qui ne donne pas une image fidèle et constante dans le temps de cette donnée d’une importance cruciale pour projeter un avenir entrepreneurial voire social. 

La nécessité de comparer ce qui peut l’être

Pour le SDI, la notion d’« entreprise » se doit d’être clairement définie, au moins dans les données statistiques, notamment pour donner aux pouvoirs publics une vision claire de l’activité économique et de ses perspectives. 

Sans dénier le droit imprescriptible de tout citoyen à lancer son activité, force est de constater que les microentrepreneurs constituent une masse non homogène de travailleurs économiquement dépendants, d’individus en recherche d’un complément de revenu actifs par ailleurs en qualité de salarié, étudiant ou membre de la fonction publique, et enfin, en nombre minoritaire, d’entrepreneurs à temps plein qui lancent leur activité.

Proposition

  • Exclure des données INSEE sur la création d’entreprises, les données relatives aux travailleurs des plateformes ainsi que les microentrepreneurs en complément d’activité.
Résorber les fragilités des TPE liées à la crise du covid

Un tissu artisanal et commercial fragile dès avant la crise de la Covid

  • 1/3 des TPE présentait des fonds propres négatifs à fin 2019 selon l’OFE (Observatoire du Financement des Entreprises).
  • Une trésorerie inférieure à 1 mois de CA pour la moitié des TPE, dont inférieure à 8 jours pour un quart d’entre elles[2].

La France loin de la moyenne européenne dans le niveau de soutien à ses entreprises

Selon la BDF[3], le premier confinement a constitué un choc de trésorerie pour l’ensemble des entreprises évalué à 160 Mds€. 

Au global, le reste à charge des pertes de revenus des entreprises en France est évalué à 22% contre 7% pour la moyenne européenne[4]

Des cessations volontaires d’activité deux fois plus élevées en 2021 qu’en 2019

Il est courant d’afficher la forte baisse des procédures collectives (liquidations judiciaires et redressements judiciaires) comme preuve de la pertinence et de l’efficacité des soutiens de l’État. 

Pour autant, un autre indice est à prendre en considération, à savoir celui des cessations volontaires d’activité. Les chiffres à cet égard sont éloquents et inquiétants puisque plus de 170.000 radiations volontaires ont été enregistrées par les greffes des tribunaux de commerce sur les 8 premiers mois de l’année 2021, soit le double de celles enregistrées sur la même période de 2019 et 30.000 de plus que sur la même période de 2020. 

Les TPE face à un mur de dettes à l’horizon 2022

  • 51,6 Mds€ au titre des PGE contractés par 604.000 TPE et d’ores et déjà consommés à 50% en moyenne[5] et à plus de 80% pour une TPE sur 3 selon les enquêtes du SDI
  • 17,1 Mds€ de dette sociale reportée
  • Des dettes personnelles non prises en compte

Un risque élevé de cessation d’activité pour des entreprises viables avant la crise sanitaire

Conformément aux constats du CAE et de Benoit Cœuré[6], les TPE qui ont eu recours au PGE ne figurent ni parmi les entreprises en bonne santé financière avant-crise, ni parmi les entreprises en mauvaise santé financière. Il s’agit en conséquence de structures en capacité de maintenir leur activité dans un contexte économique classique mais dont le niveau d’endettement lié à la crise sanitaire présente des risques élevés d’insolvabilité et donc de cessation d’activité.

Propositions

  • Étendre le dispositif « coûts fixes » à toutes les TPE sans distinction du secteur d’activité.
  • Allonger la maturité du PGE de deux années supplémentaires.
  • Reconduire sur 2022 le dispositif d’étalement du paiement des charges sociales et fiscales sur 12, 24, 36 mois au titre des revenus 2021.
  • Isoler la dette Covid dans le bilan des entreprises.
  • Créer une « Maison de la prévention et du traitement des difficultés des entreprises » au sein des tribunaux de commerce.
  • Faire précéder toute assignation en procédure collective d’une phase de conciliation par saisine du président du tribunal compétent en ce qui concerne les créanciers institutionnels.
  • Créer un fonds de soutien à la prise en charge des frais de procédure de prévention des difficultés des entreprises pour les indépendants et dirigeants de TPE.
L'indispensable relance du commerce de proximité

Jugé « non-essentiel » durant les périodes de confinement, le commerce de proximité s’est au contraire révélé durant la crise sanitaire comme un lieu incontournable de lien social. 

Une dévitalisation des centres-villes accélérée par la crise sanitaire

En 2018, seul un tiers des centres-villes étaient placés sous la barre symbolique des 10 % de vacance commerciale contre la moitié en 2015.

L’urbanisme commercial en question

La politique nationale de revitalisation des centres-villes concrétisée par le lancement en 2018 du dispositif « Action Cœur de Ville » est restée sans effet quant au développement des mètres carrés commerciaux de périphérie, première cause de déséquilibre entre les différentes formes de distribution physique. De fait, 65 des 80 communes Action Cœur de Ville les plus touchées par la déprise du commerce de proximité de centre-ville, ont accepté des implantations ou agrandissements de grandes surfaces de périphérie en 2018-2019.

L’impact de l’accélération du développement du e-commerce

Le e-commerce représentait 9,8% du commerce de détail en 2019, il en représente aujourd’hui 13,4%, soit 112Md€.

Les éléments de concurrence jugée déloyale par les commerces de proximité

Les problématiques essentielles des commerçants au regard des opérateurs du e-commerce relèvent des politiques promotionnelles permanentes (French Days, Amazon Prime Days, Ventes privées, Anniversaires, Black Fryday,…) ainsi que de régimes fiscaux inéquitables, et moins de l’existence même de cette forme de distribution.

La digitalisation des commerces de proximité

Les professionnels qui ont développé une forme de « digitalisation » l’ont fait dans leur écrasante majorité sous forme de présence sur les réseaux sociaux de type Facebook ou Instagram. Il s’agit certes d’un premier pas, loin encore de pouvoir concurrencer l’ergonomie, l’indexation et la facilité d’utilisation des sites internet des pure players.

Les baux commerciaux : un piège plus qu’une protection pour les locataires

La relation contractuelle entre bailleurs et locataires est particulièrement déséquilibrée à la lumière de ces éléments et il conviendrait d’accorder plus de pouvoirs de négociation aux locataires, ce qui contribuerait par ailleurs à diminuer le prix des loyers commerciaux. 

Propositions 

  • Une priorité pour l’implantation de tout nouveau commerce en centre-ville et non en périphérie.
  • Un moratoire sur l’agrandissement des surfaces commerciales de périphérie, au moins dans les secteurs des villes moyennes et petites qui souffrent d’un taux de vacance commerciale élevé.
  • Une animation commerciale de centre-ville, des conseils et analyses sur les éléments d’attraction de la clientèle gérés par des professionnels (managers de centre-ville).
  • Une fiscalité adaptée : 
    • Différencier la fiscalité de périphérie et celle de centre-ville, notamment en ce qui concerne la CFE ;
    • Soumettre à la TASCOM les entrepôts de VAD non adossés à un commerce physique).
  • Règlementer les promotions.
  • Développer des markets places au niveau des Régions (compétence économique) à destination des commerces de proximité.
  • Développer une formation aux usages numériques pour les artisans et commerçants.
  • Interdire la répercussion de la taxe foncière sur le locataire.
  • Supprimer la faculté de caution solidaire de 3 années du précédent locataire en cas de cession de bail.
  • Autoriser la résiliation annuelle du bail commercial par le locataire, au moins sur les 3 premières années.
Le financement des TPE

La dépendance structurelle des TPE au crédit bancaire

Situées en bout de chaîne économique, les TPE n’ont pas la faculté de jouer sur les délais de paiement clients-fournisseurs. 

Elles ne peuvent faire appel au marché pour se financer, ni procéder à une augmentation de capital. 

Au regard de fonds propres plus faibles que ceux des PME, elles n’ont d’autre choix que de se tourner vers les établissements de crédits.

Le modèle économique bancaire obstacle aux capacités d’investissement et de croissance des TPE

Dans un contexte de fragilité accrue, les TPE rencontreront inévitablement des besoins de trésorerie à affecter au remboursement des 68Mds€ de dettes bancaires et sociales accumulées ces deux dernières années.

La pratique bancaire de garantie sur le patrimoine personnel du chef d’entreprise

Dans la tradition de toutes les tentatives précédentes de protection du patrimoine personnel du chef d’entreprise, le Plan pour les Indépendants rend une nouvelle fois possible au chef d’entreprise une dérogation à cette protection de droit sur requête d’un ou plusieurs créanciers. Les banques sont habituées à ces législations et leurs dossiers de crédit comportent systématiquement une garantie, dans la moitié des cas sur le patrimoine du chef d’entreprise.

La protection de droit du patrimoine personnel à l’égard des créanciers de l’entreprise vient ainsi élever la banque au rang de créancier super-privilégié. 

Un manque de transparence tarifaire doublé d’obstacles à la mobilité bancaire

Partiellement bénéficiaires des mesures sur la transparence tarifaire adoptée en 2017, les professionnels ne bénéficient pas en revanche de la faculté à faire jouer la concurrence bancaire par le biais de la portabilité des comptes.

En conséquence, le professionnel qui entend changer de banque est freiné voire empêché par des considérations administratives jugées difficilement surmontables (information des clients, fournisseurs et administrations) et lourdes de conséquences pour son activité (dégradation de sa notation bancaire et/ou de ses relations avec ses fournisseurs en cas de rejet de paiement sur un compte clos ou ne disposant plus de la provision suffisante).

Propositions

  • Instituer une obligation bancaire de proposition d’une alternative à l’engagement du patrimoine personnel du chef d’entreprise pour tout crédit lié à l’activité professionnelle.
  • Plafonner les frais bancaires sur incident de paiement des comptes courants des petites entreprises.
  • Étendre la portabilité des comptes bancaires aux comptes courants des entrepreneurs individuels et TPE.
  • Confier au CCSF (Comité Consultatif du Secteur Financier) la mission d’évaluer les modalités de financement bancaire des petits crédits de trésorerie des TPE.
Relancer l'emploi dans les TPE

Les TPE championnes toutes catégories de la création d’emplois selon l’INSEE

L’analyse de la création d’emplois sur période longue d’un point de vue dynamique et non statique (de date à date) démontre que les TPE créent le plus grand nombre d’emplois en France lorsque les grandes entreprises sont celles qui en détruisent le plus[7].

Le vivier d’emplois au sein des TPE loin d’être épuisé

Fortes de 2,1 millions d’unités (hors micro-entreprises de type autoentrepreneurs), les TPE sont présentes dans tous les secteurs d’activité, toutes les branches professionnelles. Elles maillent l’ensemble du territoire et sont donc en capacité de proposer des emplois de proximité.

Avec seulement 40% d’entre elles ayant entre 1 et 9 salariés, les TPE représentent un immense potentiel d’emplois en qualité de primo-employeurs, comme dans le cadre de leur développement.

Force est de constater à cet égard que, depuis 2008, chaque épisode de mesures visant à réduire les charges sur les salaires a démontré que les TPE ont des besoins de recrutement non pourvus, en partie du fait du niveau élevé des charges sociales.

Une nouvelle réforme de la formation initiale est-elle de nouveau nécessaire ?

Selon l’enquête BMO 2021 de Pôle Emploi et du CREDOC, la pénurie de candidats constitue l’une des difficultés majeure de recrutement, à égalité avec l’inadéquation des profils.

Des secteurs entiers et importants de l’économie estiment être en pénurie de main d’œuvre formée (coiffure, BTP, CHR,…).

Ce fait peut paraître étonnant alors que plus de 200.000 contrats d’apprentissage supplémentaires ont été signés en 2020, soit 525.000 contrats contre 132.000 en 1993.

En réalité, la réforme de 2018 sur l’apprentissage et le renforcement des aides dans le cadre du Pan « 1 jeune – 1 solution » de juillet 2020 n’ont en rien modifié les défauts structurels de l’apprentissage aux métiers manuels. 

Dans ce contexte, non seulement la relève des professions artisanales et commerciale n’est pas assurée, mais encore cette situation pénalise les capacités de développement des TPE.

Propositions 

  • Adopter un dispositif de zéro charge intégral durant les deux années suivant une nouvelle embauches au sein des entreprises de moins de 10 salariés
  • Désocialiser et défiscaliser les heures supplémentaires
  • Établir un bilan de la réforme de l’apprentissage de 2018 du point de vue de la formation initiale.
La protection sociale

La forte recherche d’une protection sociale de la part des nouveaux indépendants

Les données de l’entrepreneuriat ont radicalement changé ces vingt dernières années avec des individus qui passent du salariat à l’entrepreneuriat et réciproquement plusieurs fois dans une vie de travail. Ces nouveaux entrepreneurs alternatifs recherchent un maintien de leurs droits sociaux, quel que soit leur statut. 

L’acceptation du coût attaché à un renforcement de la protection sociale

La population des nouveaux entrepreneurs, bien souvent salariés avant la création de leur entreprise, tend nettement vers une volonté de conserver la protection sociale dont ils bénéficiaient avant, quitte à en assumer le coût. 

Ce n’est pas un hasard si la SASU est devenue au fil des ans la première forme de création de société en France (61% à ce jour) : il s’agit de la seule forme d’exercice d’une activité individuelle qui permet au chef d’entreprise d’être « assimilé salarié ».

Un rendez-vous décevant sur ce point dans la cadre de la loi en faveur de l’activité indépendante

Loin d’avoir renforcé cet aspect de la protection de la sécurité sociale des indépendants, la loi en faveur de l’activité indépendante s’est contentée de mettre en lumière le dispositif déjà en vigueur d’accès à la couverture AT-MP assorti d’une baisse de cotisation de 30%. 

Cette initiative mérite d’être déclinée sur d’autres branches de la protection sociale. 

Propositions 

  • Autoriser les professionnels indépendants qui le souhaitent à bénéficier de la couverture sociale des salariés.
  • (Alternative) : Proposer aux indépendants des modules de renforcement de leur protection sociale par thèmes (maladie, retraite,…), comme il en existe déjà un concernant la protection AT-MP.

Le S.D.I est né en 1993 au constat de l’absence d’organisation patronale interprofessionnelle entièrement dédiée aux TPE, entreprises de moins de 20 salariés.

Le syndicat