La structure du chômage en France est notamment concentrée aux deux extrémités de la pyramide des âges, à savoir les jeunes de moins de 26 ans et les séniors de plus de 55 ans. Ce phénomène n’a rien de nouveau et place depuis longtemps la France dans une triste situation d’exception au sein des pays de l’OCDE.
Le gouvernement a décidé de s’attaquer à ce défi, avec le « Contrat de Génération » ciblant les jeunes de moins de 26 ans et les séniors à partir de 57 ans. Puisque toute embauche suppose un employeur (on semble souvent l’oublier ces derniers temps) les incitations se feront par la carotte et par le bâton, mais, de fait, sans les TPE.
Le bâton pour les entreprises de plus de 300 salariés
Ces dernières seront tenues de négocier avec les syndicats, au niveau de l’entreprise et/ou de la branche, en vue de la mise en place d’un contrat de génération collectif sous peine de voir supprimés leurs allègements de charges sur les salaires inférieurs à 1,6 SMIC. Du temps est toutefois laissé au temps puisque les négociations devront avoir abouti d’ici au … 30 septembre 2013 !
La carotte pour les entreprises de moins de 300 salariés
Pour ces dernières, la mise en place de contrats de génération sera facultative et compensée par des aides à hauteur de 4000€/an (2000€ pour le jeune ; 2.000€ pour le sénior conservé à l’emploi).
Coût total de l’opération : 2,5Mds€ pour un prévisionnel de 500.000 embauches et 500.000 emplois maintenus, le tout sur 5 ans.
Modalités de l’aide aux entreprises de moins de 300 salariés
- Durée : 3 années pour le jeune et jusqu’à la liquidation des droits à retraite pour le sénior.
- Contrôle : les deux salariés élaboreraient tous les six mois un rapport commun retraçant les actions entreprises par le senior et actant les acquis du jeune. Ce rapport serait à la disposition de l’inspection du travail, qui pourrait ainsi contrôler la réalité de la formation dispensée. L’entreprise dresserait chaque année un bilan des contrats de génération en cours, bilan rendu public, car annexé à ses comptes sociaux déposés au greffe du tribunal de commerce.
Un dispositif sans intérêt pour une écrasante majorité de TPE
Une usine à gaz
Il est légitime qu’en ces périodes de disette budgétaire, l’Etat cherche à minimiser les coûts de ses dispositifs sociaux. A cet égard, la distinction réalisée entre les entreprises en fonction de leur taille constitue un signe positif d’une prise de conscience de la nécessité de différencier les politiques en fonction des segments d’entreprises.
Il est de même de bonne gestion que l’Etat contrôle le bon usage des aides auprès des bénéficiaires. Mais qui peut imaginer qu’une TPE, qui emploie en moyenne trois salariés, mais dont plus d’une sur trois ne compte qu’un seul salarié et plus de la moitié ne compte qu’un ou deux salariés, s’engage dans une usine à gaz administrative de bilan semestriel de formation et d’annexe au bilan comptable ?
Un dispositif une fois de plus inadapté aux TPE
Si la notion de « gestion prévisionnelle des emplois » est adaptée à une structure disposant d’un service de ressources humaines, elle est par nature sans impact sur les TPE dont les préoccupations quotidiennes à l’égard de l’emploi méritent des réponses rapides, pragmatiques et d’application simple.
Un dispositif potentiellement applicable à la marge par les professionnels indépendants
Des négociations doivent s’engager afin de déterminer dans quelle mesure un Contrat de Génération pourrait être conclu entre un chef d’entreprise sénior et un jeune aux fins de transmission de l’entreprise.
Il ne reste donc plus qu’à trouver des jeunes de moins de 26 ans compétents ayant pour objectif de reprendre une activité commerciale ou artisanale, reprise évidemment financée à l’aide d’un prêt obtenu auprès d’un établissement bancaire…
Le Contrat de Génération encensé par les organisations professionnelles « représentatives »
Dès lors que toutes les centrales syndicales de salariés et les organisations patronales représentatives estiment que le CG est positif, pourquoi le SDI serait-elle la seule organisation professionnelle à le critiquer ?
Tout simplement parce que chacun trouve son compte dans ce dispositif :
- le MEDEF car le CG vient en lieu et place de précédentes obligations applicables aux grandes entreprises en matière d’emploi des séniors, obligations sanctionnées par des pénalités équivalentes à 1% de la masse salariale. En d’autres termes, les grandes entreprises ne gagnent rien à la mise en place du CG, mais ne perdent rien non plus
- la CGPME parce que les entreprises de taille moyenne vont pouvoir bénéficier d’aides au titre d’embauches qu’elles auraient réalisées en tout état de cause
- l’UPA du fait de l’extension du dispositif aux chefs d’entreprise séniors souhaitant transmettre leur entreprise à un jeune
- les organisations de salariés puisque le CG, autrement dénommé « Pacte Générationnel » est d’une logique implacable sur le papier, fort séduisant sur le principe, est supposé maintenir les séniors à l’emploi et contraint à la mise en place de nouvelles négociations en entreprises et dans les branches professionnelles
Les seules à ne pas y trouver leur compte sont les TPE, une nouvelle fois noyées dans la catégorie générale des PME.