Les Caisses de congés payés : un boulet pour le bâtiment ?

Le secteur du bâtiment traverse une crise sans précédent. En 2024, les faillites dans la promotion immobilière ont explosé de 150 % par rapport à 2023. Et la tendance ne s’inverse pas : au premier trimestre 2025, les défaillances continuent leur envolée avec une hausse de 21 % par rapport à la même période l’année précédente.

Cette hémorragie frappe tout le secteur de la construction, en particulier le second œuvre, qui a vu 8 307 entreprises mettre la clé sous la porte en 2024 (+21 % par rapport à 2023). Et 1 555 de plus ont suivi au premier trimestre 2025.

Certes, l’effondrement de l’activité en est la première cause. Mais un facteur aggravant, souvent passé sous silence, mérite d’être dénoncé : l’action des Caisses de congés payés du bâtiment.

Des caisses aux méthodes brutales

Plutôt que de jouer un rôle d’amortisseur social, les Caisses de congés payés se comportent comme des agents de recouvrement impitoyables, n’hésitant pas à assigner devant les tribunaux les entreprises en difficulté, et ce, même lorsque les salariés ont déjà perçu leurs congés.

En effet, lorsque l’employeur n’a pas versé les cotisations à la Caisse, celle-ci ne reverse tout simplement pas les congés. L’entreprise verse donc elle-même les congés à ses salariés. Pourtant, la Caisse peut exiger un paiement « en double », assorti de majorations, pénalités et frais de justice.

Un engrenage infernal qui pousse de nombreuses structures à la liquidation. Pendant que les entreprises s’effondrent, les Caisses, elles, engrangent les pénalités.

Des pouvoirs démesurés

Mais l’appétit des Caisses ne s’arrête pas là. Légalement dotées de pouvoirs d’investigation et de contrôle aussi étendus que les URSSAF, leurs limiers traquent les structures qui ne seraient pas affiliées. Contrairement à ce qu’indiquent leur intitulé, les Caisses « du bâtiment » ne s’occupent pas uniquement des entreprises de ce secteur, mais plus globalement de toute entreprise dont au moins une activité touche au bâtiment.

A une époque, la règle établie par les Caisses était claire : changer une ampoule, brancher une conduite d’eau, creuser un trou,… étaient autant d’activités du bâtiment qui justifiaient l’affiliation de tous les salariés de la structure concernée.

Certaines branches professionnelles se sont réunies en collectif pour s’opposer à cette extension du domaine d’intervention des Caisses. Mais la situation n’est pas si simple : il ne suffit pas d’appliquer une convention collective autre que celle du bâtiment pour être exonéré de l’affiliation.

Une insécurité juridique permanente

Prenons l’exemple concret d’une entreprise de menuiserie-charpente de la Loire. Son activité : conception, fabrication et pose de charpentes bois. Rattachée à la convention de l’industrie du bois, elle bénéficie en principe d’une dérogation d’affiliation.

Mais la Caisse Rhône-Alpes Auvergne en a décidé autrement : assignation en justice. Résultat : victoire de l’entreprise en première instance, mais défaite en appel. Condamnée à transmettre six ans de bulletins de paie pour appel de cotisations, majorations et pénalités. Une entreprise saine… vouée à disparaître.

Deux poids, deux mesures

Certains cas sont exonérés d’affiliation :

  • Les salariés en CDD (un paradoxe quand la mission des Caisses est justement de protéger les salariés précaires),
  • Les entreprises du bâtiment établies dans un autre pays de l’UE, à condition de prouver qu’elles versent elles-mêmes les congés.

En résumé : une entreprise étrangère peut verser directement les congés à ses salariés. Une entreprise française ne le peut pas. Où est la logique ?

Une réforme s’impose

Dans un contexte aussi dramatique pour le bâtiment, il est temps de poser la question de l’utilité et des méthodes des Caisses de congés payés. Au lieu de protéger les salariés comme elles le prétendent, elles fragilisent l’écosystème tout entier.

Sont-elles encore adaptées à la réalité économique du secteur ? Ou sont-elles devenues une institution archaïque et prédatrice ?

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